La secte - dont la définition est encore floue - fonctionne avec un gourou et un adepte. L’adepte va adhérer librement au groupe sectaire. Il le choisit. Il est attiré par lui. Quand peut-on parler d'emprise sectaire ? Quel est le profil de l’adepte ? Comment se passe la sortie de la secte ? Et la reconstruction de l’ex-adepte ?
Pour définir le mot secte, plusieurs auteurs ont choisi de se référer aux deux mots latins : secare (couper) et sequi (suivre).
Le dictionnaire Larousse définit la secte comme un « Groupement religieux, clos sur lui-même et créé en opposition à des idées et à des pratiques religieuses dominantes ».
Voici deux éléments permettant de définir un culte destructeur :
Jean-Claude Maes1, psychologue belge a décrit les étapes de l’embrigadement sectaire :
Anne Fournier a employé l’expression « addiction sectaire »2 même si reconnaît-elle il faut manier ce concept avec prudence. La rencontre entre la personne, l’objet, la secte et le moment - par exemple un moment de crise personnelle - fait penser au cadre « tri-varié » : définition de l’addiction donnée par le Dr Claude Olivenstein.
Jean-Marie Abgrall3, psychiatre, criminologue avait parlé de « double lien » de dépendance, avec une dépendance idéologique, sujétion à la pensée sectaire et une dépendance sociologique : appartenance à un nouveau groupe qui devient un refuge protecteur, une structure de substitution. Il a ajouté une troisième phase qui aboutit à l’asservissement total de l’individu.
Non. De nombreuses recherches ont montré que les plus jeunes avaient tendance à être plus faciles à manipuler car ils sont plus ouverts aux nouvelles idées que les plus âgés, souvent méfiants. L’entrée dans la secte pourra se faire par un ami, un collègue ou un membre de sa famille. Quelqu'un en qui la personne a toute confiance. Quelqu’un qui pense avoir trouvé dans la secte une « solution » à son problème et avoir retirer beaucoup de bienfaits dans la secte aura tendance à vouloir coopter une personne de son entourage.
Emprise signifie : saisir physiquement ou par l’esprit. Cédric Roos4 la décrit dans sa thèse de médecine comme : « un état de de soumission et de dépendance qui engendre une certaine forme de régression intellectuelle, spirituelle, morale et affective ».
La psychologue Marie-France Hirigoyen5 nous dit que « … le but est de dominer et de soumettre la personne ». Elle ajoute : « il s’agit d’une manipulation mentale et verbale qui emploie des moyens de persuasion coercitifs de nature affective et émotionnelle, sans oublier le chantage. En définitive, cette situation prive les personnes de tout jugement personnel ».
La personne va changer radicalement :
Sur le site de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES), le nombre de groupes sectaires est estimé à 500 avec 500 000 adeptes (dont 60 000 à 80 000 enfants – chiffre de 2006).
Un sondage réalisé en septembre 2010 par l’institut IPSOS donne les informations suivantes :
Des enquêtes parlementaires réalisées en Espagne et aux Etats-Unis rapportent qu’entre 0,5 et 1 % de la population aurait été sous influence sectaire.
14,7% de la population canadienne ferait partie d’un groupe pouvant être considéré comme sectaire (statistiques de 2008).
L'adepte va devoir retrouver une vie normale :
Pour aider la personne à sortir de la dépendance sectaire, Jean-Claude Maes conseille de faire intervenir conjointement : la famille, des associations de défense… Pour lui, les ressources apportées par la famille ont une place centrale dans la sortie de la dépendance sectaire.pour essayer de faire sortir la personne d'une secte, il faut :
C'est tout un processus qu'il ne faut pas précipiter.
La prise en charge de l’ex-adepte pourra se faire sous la forme d’une psychothérapie individuelle ou familiale. La thérapie sera lente. La personne devra petit à petit « réintégrer le réel ». Le thérapeute va aider l’ex-adepte à retrouver son autonomie de pensée tout en lui apprenant à lutter contre un sentiment de solitude qui aura tendance à l’envahir après la rupture sectaire.
L’ex-adepte ou sa famille pourra aussi faire appel à des juristes ou organismes sociaux pour dénoncer les infractions des sectes, bénéficier de procédures de sauvegarde.
La chose la plus importante est d'éduquer pour permettre à chacun de distinguer un culte destructeur d'un groupe d'excentriques. En France, le gouvernement via la MIVILUDES est très présente dans la protection des personnes vulnérables en éditant des documents d’information. La France est en pointe en termes de lutte. La Scientologie y a été poursuivie en justice avec succès...
Duretete O, Grall-Bronnec M, Venisse JL. Idéalisation et dépendance sectaire, reconstruction et lutte contre des processus passés d'aliénation. Le Divan familial. 2008;21(2):169-84
Fournier A. La notion d’addiction permet-elle une meilleure compréhension du phénomène sectaire ? Bulles. 2009;102.
Riand R. Du groupe familial au groupe sectaire : une quête d’indifférenciation. Dialogue. 2011;191:115-23.
L’actualité sur l’emprise sectaire dans l’espace documentaire de l’IFAC
Le site de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) : https://www.derives-sectes.gouv.fr/
1Maes JC. Familles et sectes. Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de réseaux. 2001; 1(26):196-218.
2 Fournier A. La notion d’addiction permet-elle une meilleure compréhension du phénomène sectaire ? Bulles. 2009;102.
3 Abgrall JM. La mécanique des sectes. Paris: Payot; 2002
4Roos C. La relation d'emprise dans le soin. [Thèse de médecine]. Besançon: Université de Franche-Comté; 2006.
5 Hirigoyen MF. Abus de faiblesse et autres manipulations. Paris: Jean-Claude Lattès; 2012.